Couronné champion du monde du 10 000 m le week‑end précédent, Jimmy Gressier a enchaîné avec un bronze sur 5 000 m. Résultat net: deux médailles et une case d’histoire cochée — premier Français à réussir cela sur un même Mondial. En coulisses, les scènes étaient aussi télévisuelles que l’exploit. Sa mère Lydia a lancé « T’es là Mimi? » depuis Boulogne, Jimmy a admis être « cramé mentalement et physiquement » et a promis, sobrement, une pizza et « une bonne petite bière ». Rudy Gressier, oncle emporté par l’émotion sur RMC, a résumé l’ambiance familiale par « Génial! Quelle course!… La famille est en folie! » Et le protagoniste n’a pas mâché ses mots : « J’écris encore l’histoire: aller chercher deux médailles sur un sport ultra-concurentiel… J’ai déplacé des montagnes. » Ce mélange d’humain et d’exploit a, pour une période, rendu la météo secondaire. Presque.
Entre intempéries et décisions arbitrales, Tokyo a offert du spectaculaire et du capricieux. Les finales du saut en hauteur féminin et du lancer de disque hommes ont été perturbées par la pluie. Une Australienne a remporté le concours de la hauteur au nombre de sauts après avoir passé 2,00 m, devant Maria Zodzik (Pologne) et Yaroslava Mahuchikh (Ukraine). Côté disque hommes, un Suédois s’est imposé devant Mykolas Alekna (Lituanie) et Alex Rose (Samoa). La légende Shelly‑Ann Fraser‑Pryce a bouclé sa carrière aux Mondiaux avec une médaille d’argent, moment chargé d’émotion. Les relais ont ajouté leur lot d’inattendu : le Botswana s’impose dans un photo‑finish, devant les États‑Unis et l’Afrique du Sud, le podium se jouant en 7 centièmes. Les Américains, triples champions du 4×400 m, avaient d’abord été éliminés mais ont obtenu un repêchage après recours ; ils l’ont remporté face au Kenya en 2:58.48 contre 3:00.39, retrouvant in extremis une place en finale. Noah Lyles, lui, a franchi la ligne en vainqueur dans sa course, devant Canadiens et Néerlandais.
Le décathlon a livré des particularités aussi fines que serrées. Leo Neugebauer (Allemagne) est sacré champion du monde, devant Ayden Owens‑Delerme (Porto‑Rico) et Kyle Garland (États‑Unis). Avant l’ultime 1 500 m, Garland était provisoirement en tête avec 7 322 points, Neugebauer suivait à 7 269 pts et Owens‑Delerme à 7 238 pts — 15 points seulement séparaient Neugebauer et Garland. Les Bleus ont aussi tenté leur percée dans cet espace‑temps : Antoine Ferranti a signé 14″78 au 110 m haies, 43,04 m au disque, 4,60 m à la perche (il avait un record à 5,00 m cette saison) et a lancé 53,06 m au javelot ; il pointait 13e après ces épreuves. Makenson Gletty a aligné 14″06, 42 m au disque, 4,90 m à la perche et 62,89 m au javelot, pour une 10e place provisoire. Des chiffres qui disent autant de talent que de marge de manœuvre.
Bilan ? Un Mondial livré sous tension : pluies, repêchages improbables, adieux douloureux et quelques surprises qui ont fait plier les pronostics. Gressier a pris sa place dans les almanachs et, honnêtement, il a l’air prêt pour sa pizza. Le reste du plateau a fourni du spectacle — parfois parce que c’était prévu, souvent parce qu’il a fallu improviser. Voilà qui finit bien la foire des certitudes.