Médaille de bronze autour du cou, Paul Seixas a répondu avec la fraîcheur d’un gamin surpris par sa propre carte d’identité : « Ce que je voyais sur le compteur était d’un autre monde comparé à ce que j’avais fait jusque-là ! » Puis il a calmé le cardio médiatique : « Je ne réfléchis pas à cela, je me laisse juste porter par le vent… Maintenant je veux juste bien finir la saison, que tout se passe bien sur le Tour de Lombardie et qu’avec l’équipe on aille chercher un beau résultat. » Bergame arrive donc comme la conclusion logique d’une saison qui ne ressemble pas à celle d’un coureur envoyé au front sans plan. Le Tour de Lombardie, au bord du lac de Côme, doit boucler sa première année dans la cour des grands.
La trajectoire, factuelle, n’appelle pas d’envolées lyriques. Il y a un an Seixas roulait encore sur le circuit juniors, sur des épreuves de 120–130 km. Cette saison, il a enchaîné : 5e du Grand Prix La Marseillaise, podiums et 12e du général au Tour des Alpes, 8e au Critérium du Dauphiné. Aux championnats de France il signe un 3e au chrono et un 9e sur la course en ligne. Aux Mondiaux : 16e en CLM individuel, 2e en CLM par équipe mixte, 13e sur la course en ligne. Et puis ce 3e rang aux Championnats d’Europe, derrière Tadej Pogacar et Remco Evenepoel, après plus de 200 km. Le directeur de la performance Jean‑Baptiste Quiclet résume la méthode sans emphase : « On a fonctionné par tronçons dans sa saison… lorsqu’il est allé en compétition, il est toujours arrivé avec un niveau de fraîcheur et de performance plutôt bon. » Côté charge, le chiffre parle : 37 jours de course cette année, espacés, et une progression encadrée parce que le garçon a commencé le haut niveau pendant le Covid, donc il y a cinq ans seulement. Quiclet rappelle la prudence passée : en juniors il roulait parfois 20 heures par semaine pendant les vacances. Donc non, personne n’a mystifié sa préparation, on a monté les étages doucement et noté sa « très bonne faculté de récupération. »
Les entraîneurs et sélectionneurs sourient avec prudence. Thomas Voeckler observe que Seixas « s’est rendu compte qu’il était capable de passer un cap » et note son respect des consignes « au millimètre ». Puis il ajoute le recul nécessaire : « Maintenant on prendra ce qu’il nous donne… Et si cela va moins bien dans six mois, qu’il ne fait pas une place dans le top 10, ce n’est pas grave. » Le staff de Decathlon‑AG2R La Mondiale n’a d’ailleurs jamais caché son dilemme Grand Tour. Quiclet a expliqué que l’antériorité des charges fait défaut pour l’envoyer cette année sur trois semaines. Le dossier n’est pas fermé pour 2026, mais il sera examiné lors d’un bilan de fin d’année. Dominique Serieys, lui, penche pour le Tour de France si l’on veut lui construire de l’expérience pour 2028–2030 ; l’équipe promet une protection si l’aventure venait à se concrétiser. Le contrat court jusqu’en 2027 et l’équipe dispose désormais de moyens accrus grâce à deux co‑sponsors, dont CMA‑CGM, propriétaire de RMC Sport.
On peut donc applaudir la médaille sans confondre vitesse et précipitation. Le schéma est posé : progression par tiroirs, surveillance de la charge, pause d’analyse en décembre et, en attendant, finir proprement le calendrier avec le Tour de Lombardie. Les discours sont mesurés, les chiffres sont là, et dans le souci de ne pas brûler d’étapes, on garde l’emballement pour les podiums à venir.











































