Il suffisait d’un lob parfait, le 1er février, pour que tout le monde range son cynisme dans la poche. Antoine Griezmann, d’un extérieur de la surface, avait remis un peu de poésie dans une saison grise. Depuis cette prouesse contre Majorque, la poésie s’est fait timide : vingt-deux matches sans but en Liga et seulement trois passes décisives sur la même période. Résultat immédiat et sans appel, le héros colchonero a glissé sur le banc. Sur les dix-sept derniers matches de l’Atlético, il n’a débuté que six fois. Le choix de rester dans la capitale cette saison comportait un risque connu : perdre sa place s’il n’enchaînait pas les titularisations. Ce risque est devenu réalité.
Les faits ne sont pas tendres. Les mauvais résultats de l’Atlético depuis août et une infirmerie bien remplie ont, ironiquement, rendu service au natif de Mâcon : blessures et contre-performances ont multiplié ses fenêtres de tir. Il a ainsi été titulaire à Anfield lors de la défaite contre Liverpool, et surtout aligné dans les deux seules victoires madrilènes en Liga cette saison. Petite précision utile : l’équipe a réussi à refaire son retard contre le Rayo Vallecano après la sortie de Griezmann, preuve que la présence du Français n’a pas toujours été synonyme d’ascenseur immédiat. Marca, qui ne fait pas dans l’hypnose, écrit qu’il est « incapable d’améliorer ce qui se passe sur le terrain » et le qualifie « bien loin du niveau attendu » en 2025. Technique intacte, jugent certains ; impact et dynamisme en berne, ajoutent les chiffres. Comparé à la saison précédente, Griezmann signe moins de courses vers l’avant, moins de dribbles, moins de passes dans le dernier tiers et moins de duels aériens. Les tableaux ne mentent pas : le profil du joueur a changé, et pas forcément dans le bon sens.
La description devient plus piquante quand on replace les choses dans le temps. En début de saison 2024-2025, le « néo-retraité international » illuminait les matches, apportant ce supplément d’âme que réclame l’Atlético parfois en panne d’inspiration. Puis mars est arrivé. C’est le mois où l’équipe croyait pouvoir tout gagner et, paradoxalement, s’est retrouvée battue dans toutes les compétitions. Griezmann, jusque-là lumière intermittente, s’est éteint au pire moment. Statistiquement, il n’a toujours pas marqué contre une équipe du top 9 en Liga la saison passée, et cette saison cherche à lancer son compteur. Le calendrier offre une fenêtre : un derby contre le Real Madrid. Plus théâtral, difficile à imaginer.
La situation n’est pas figée, et la franchise des bilans le rappelle sans indulgence. Reste à voir si le joueur ressortira du banc avec la même assurance qu’il avait le 1er février ou si le match contre le Real sera un simple soupir avant l’oubli. Le récit est simple, froid et répétitif : beau geste initial, longue panne, quelques titularisations héritées des malheurs collectifs, critiques publiques et statistiques en baisse. L’espoir peut subsister, mais le speaker semble déjà fatigué de répéter la même rengaine.